En réaction à un commentaire d’Olivier de Montréal, quelques développements sur l’indépendantisme québécois. Je ne prétends pas apprendre des choses aux expatriés de longue date et encore moins aux Québécois (mais je serai ravi d’avoir leur opinion à ce sujet… « Olivier ? » – « l’autre », celui de Gatineau ^^. Mais en cette période où l’on fête le 400ème anniversaire de la fondation de Québec, il est intéressant de comprendre, vu de France, les raisons du reflux de l’idée indépendantiste.
Il y eut dans l’histoire de la Belle Province deux référendums. Le premier en 20 mai 1980, à l’initiative du Premier Ministre provincial René Lévesque, fondateur du Parti Québécois, et rejeté à 59,56 %. Le second ,à la faveur du retour au pouvoir du PQ et de son chef, Jacques Parizeau, le 30 octobre 1995, a vu la courte victoire du non, à 50,58 %. On pourrait revenir longuement sur les conditions de ce vote, l‘article consacré à ce sujet sur Wikipedia apporte quelques développements à ce sujet, mais la rancœur me paraît bien inutile.
Cliquer ici pour voir la vidéo.
« Si je vous ai bien compris, vous êtes en train de dire : à la prochaine fois ! » déclarait alors René Lévesque au soir de la défaite. Et pourtant, la perspective d’un nouveau vote et donc de l’indépendance du Québec semble s’éloigner progressivement. Des sondages accordent entre 35 et 42 % de Québécois favorables à l’indépendance de leur province de la Confédération canadienne.
L’article du Monde en donne plusieurs explications.
Le Québec est parvenu à imposer la fameuse « loi 101″, ou Charte de la langue française. Cette loi-cadre définit les droits linguistiques des citoyens du Québec mais fait également du français la seule langue officielle de l’État québécois. Un progrès indéniable dans ce qui fonde – en partie – l’identité des Québécois.
Une identité par ailleurs renforcée par une motion votée en 2006 par le Parlement d’Ottawa, reconnaissant que le Québec constitue une « nation ». Une reconnaissance importante, mais qui peut passer pour une manière de satisfaire des Québécois « modérés » et abaisser les velléités indépendantistes.
Déjà à l’origine de cette motion, le Premier Ministre fédéral, Stephen Harper, se montre beaucoup plus conciliant avec les autorités québécoises, acceptant certaines revendications, notamment en matière fiscale.
Enfin, l’article du Monde note la baisse de la popularité du Parti Québécois, arrivé, 3ème avec 26 % lors des dernières élections provinciales. Le parti de Pauline Marois cherche à se recentrer sur un projet-social libéral au détriment de la perspective d’un nouveau référendum.
Mais il y a me semble-t-il une autre raison importante, et qui n’a pas été évoquée par l’article : le nombre croissant d’immigrés au Québec. Dans l’extrait vidéo ci-dessus, vous avez pu entendre Jacques Parizeau donner les raisons de l’échec du second référendum « l’argent et des votes ethniques ». Des propos qui ont provoqué beaucoup de réaction à l’époque. En 1995, 60 % des Québécois francophones ont voté en faveur de l’indépendance. Anglophones et allophones ont voté non. Certaines tribus indiennes ont même rejeté la proposition à plus de 95 % !
Or le Québec accueille chaque année plus de 45 000 immigrants. Selon des statistiques pour l’année 2006, ils venaient principalement d’Algérie (4 597 personnes), de France (3 236), du Maroc (3 031), de Chine (2 433), de Colombie (2 172), de Roumanie (2 028) puis du Liban, d’Haïti, d’Inde et du Mexique. Un grand nombre arrivent donc de pays où le français est couramment parlé : une manière de défendre l’identité linguistique de la province. Mais ces immigrés-là, et les autres, se sentent-ils concernés par les velléités indépendantistes historiques du Québec vis-à-vis du Canada ? Pour certains oui. La député provinciale de Papineau, Vivian Barbot, est bloquiste, d’origine haïtienne. Mais les autres ?
Ajoutons à cela que les subventions accordés aux programmes de francisation diminuent. Cela pose problème, car cela touche à un pilier de l’identité du Québec en terre américaine. Une statistique du début d’année a d’ailleurs suscité beaucoup d’agitation : pour la première fois depuis bien longtemps, le nombre de francophones passait sous la barre des 80 %.
La vraie question qu’il faut se poser c’est « quel intérêt le Québec aurait-il à devenir indépendant ? » Autrement dit : n’existe-t-il pas d’autres moyens que l’indépendance pour défendre l’identité québécoise , les intérêts du Québec ? C’est peut-être la question que pose ses immigrés. Ils rappellent ainsi que l’histoire du Québec et du Canada est intimement liée.